Biographie de René QUINTON


I) Introduction 


Lorsqu’on évoque la vie passionnée de René QUINTON (10866 – 1925), il faut d’abord rappeler son environnement exceptionnel de la fin du siècle et à l’orée du XXe siècle (disons 1885 – 1914) ; c’était peut-être « les trente glorieuses » de nos grands-parents, comme furent les années après 1945, pendant lesquels la France connaît une aire de prospérité favorable à l’éclosion de découvertes scientifiques et technologique exceptionnelles.

QUINTON a eu la chance d’y épanouir ses dons de précurseur et de visionnaire au milieu d’hommes de sciences hors du commun, qui surent lui communiquer leurs connaissances encyclopédiques.


En fait, le paradoxe fut que rien ne laisse présager son destin multiple :

<  Il n’était ni physiologiste, ni médecin de formation mais il a proposé les « Lois de Constance originelle du monde » et créé  une thérapeutique basée sur l’eau de mer, de même composition chimique que le plasma sanguin.

    Il n’était ni ingénieur de formation ni aviateur, mais il a contribué au développement de l’aviation naissante, puis du vol à voile en France.

<  Il n’était pas militaire de formation, mais il a fait preuve, pendant les cinquante-deux mois de guerre, de qualité exceptionnelle au combat ; volontaire comme capitaine d’artillerie en 1914, il l’a termine comme colonel en 1918, sept fois cité à l’Ordre de l’armées, huit fois blessé.

 

Ainsi, rien ne faisait soupçonner cette carrière passionnée lorsque ayant passé brillamment ses baccalauréats de Lettres et de Sciences, son médecin de père lui donna à choisir entre la Faculté de Médecine et Polytechnique, il répond :

 « la Médecine, non, Polytechnique, oui... Mais pour être officier ! ».

Son père n’y consent pas. Il décide alors, son volontariat militaire terminé, de « faire de la littérature » : il avait pris Flaubert comme modèle.
Mais ayant le goût des voyages, il entreprend le « Grand tour » pour parfaire sa culture et « visiter les antiques ».

Donc, à 22 ans, Quinton entreprend de longs voyages d’études en Égypte, en Grèce, en Italie ; simultanément, il suit des cours au Muséum d’Histoire Naturelle et s’intéresse fort à la géologie, la paléontologie, la biologie pour y puiser la matière d’un roman ; c’est alors que naît sa vocation de biologiste.
La majeure partie de cette biographie est évidemment consacrée à son oeuvre biologique, mais il faut compléter l’image de « Quinton précurseur » par celle d’un visionnaire de l’aviation naissante ; ce double aspect du personnage est directement lié avec un grand savant de l’époque : le physiologiste Jules Marey (1896), dont il devint le « double » disciple.

 

II) René Quinton Biologiste : les lois de la constance originelle

 

A l’origine des travaux de Quinton, une anecdote lui fera découvrir que la biologie lui offre  un champ de recherche passionnant. Car, c’est une observation toute banale, rappelant l’histoire de la pomme de NEWTON, qui va bouleverser le cours de sa vie.
Dans la propriété de ses parents en Bourgogne, par une belle journée d’hiver, quelqu’un dépose sur le perron de la maison une vipère engourdie par le froid, qui recouvre rapidement sa redoutable activité grâce aux contacts de la pierre chauffée par le soleil.

Cet engourdissement hivernal, ce réveil brutal des fonctions grâce à la chaleur, frappent soudain QUINTON :

« la nature, se dit-il, n’a pas créé des êtres pour dormir ».

Il songe alors que les reptiles poursuivaient une existence active aux époques géologiques où la température de la Terre était chaude et constante et où les saisons n’avaient pas fait leur apparition. Les reptiles n’hibernaient donc pas.

Loi de constance thermique :


 « La vie, apparue à l’état de cellules par une température déterminée, tend à maintenir pour son haut fonctionnement cellulaire, chez des organismes indéfiniment suscités à cet effet, cette température des origines ».

 

C’est alors que QUINTON, en visionnaire, voit d’un coup s’étager toute l’histoire de la vie. Il sait que la terre, d’abord globe en fusion s’est refroidie peu à peu à partir des pôles et que la vie cellulaire n’a pu apparaître qu’à partir d’une température abaissée aux alentours de 44°C. Il en déduit que cette apparition de la vie a commencé aux pôles, au cours du processus de dégradation où s’étaient antérieurement rencontrées les températures formidables des métaux en fusion. C’est l’époque des reptiles, des grands sauriens qui, équilibrés à cette température extérieure de 44°C, possèdent alors une activité vitale luxuriante qu’ils ont conservée aujourd’hui dans les régions tropicales.

Mais le globe continue inexorablement à se refroidir. Cet « Eden des pôles » va devenir « Terres de glace », tandis que la température permettant l’apparition de la vie glisse lentement vers l’équateur, entraînant des organismes qui émigrent, tandis que d’autres, prisonniers des circonstances, resteront dans la région originelle.

Les reptiles apparus à l’époque primaire, où la température du globe est de 44°C, n’ont aucun pouvoir d’élever leur température interne. Elle est celle du milieu où ils vivent. Elles tombent donc en même celle du globe de 44°C à 42°,40°, 35°, 30°, etc.... Mais leurs cellules, faites pour vivre à une température de 44°C, passent en même temps de l’état de vie intensive à une vie ralentie.

Remarquant que les animaux à sang chaud (mammifère et oiseaux)  apparaissent après les reptiles et à des périodes température froides, Quinton pensa que le pouvoir pour les êtres de fabriquer de la chaleur avait été créé, au refroidissement du globe, pour maintenir leurs cellules dans un milieu artificiellement chaud, qui leur permît une pleine activité, quelque fût la température extérieure.

A chaque abaissement de la température de la Terre, des organismes nouveaux apparaissent, capables d’élever leur température interne du nombre de degrés qu’a perdu la planète.

Ce point est capital : ce sont toujours les derniers organismes apparus qui possèdent la température originelle de 44°, témoignant de la condition des origines, de telle sorte que parmi les espèces vivantes, la température signe la date d’apparition.

Ces hypothèses étaient révolutionnaires, car la science officielle enseignait que les mammifères avaient une température entre 37° et 39° et les oiseaux une température entre 41° et 44°, alors que Quinton fixait la température minimale à 25° chez les plus anciens mammifères, et à 37° pour les oiseaux.

Rencontre décisive avec le physiologiste Jules Marey

Quinton expose ses vues au grand physiologiste, Jules Marey. A 65 ans, Marey était célèbre, professeur d’histoire naturelle au Collège de France, membre de l’Académie de Médecine et Président de l’Académie des Sciences. Il a devant lui, un inconnu âgé de trente ans qui ne pouvait se recommander du moindre titre scientifique.

Et pourtant le mirage produisit : Marais, enthousiasmé par les hypothèses de Quinton, lui déclara :

 « Voici vingt ans que je travaille les mouvements des animaux, je me demande comment, pourquoi ils les ont acquis – vous me l’expliquez - Voici vingt ans que j’ai tous les jours des viscères d’animaux sur ma table d’anatomie : foie, reins... J’avais renoncé à m’expliquer leurs lobulaires, leur différenciation - vous me les expliquez, et encore, tout ce que vous me dites est profondément pensé. Comment faites-vous pour dire tant de choses en si peu de mots ?»

Grâce à l’appui de Monsieur Marey qui lui ouvre les portes du monde scientifique et qui l’accueille comme assistant au Laboratoire de Physiologie au Collège de France, René QUINTON se met à poursuivre une quête passionnée, à la recherche d’espèces animales dont il a besoin pour étayer sa thèse : il visite tous les zoos et les ménageries d’Europe et ira jusqu’en Egypte, à la recherche d’animaux rares.

L’expérience confirme pleinement ses vues : les températures signent la date d’apparition des espèces : les plus anciennes, comme l’ornithorynque, dont la température est de 24°C : la température des origines. Néanmoins, certains oiseaux, les plus anciennement apparus ont, conformément à la théorie  de QUINTON, une température plus basse : 37°C pour l’aptéryx.

Ces résultats firent grand bruit. Entre la science « officielle » et ceux qui suivaient avec enthousiasme les travaux de QUINTON, la polémique atteignit son comble à propos de la température des oiseaux, mais les faits étaient là. MAREY était fier de son protégé, qui rédigea ainsi sa loi de constance thermique :

« La vie, apparue à l’état de cellule par une température déterminée, tend à maintenir pour son haut fonctionnement cellulaire, chez des organismes indéfiniment suscités à cet effet, cette température des origines. »

Après tant de bruit et de fureur, QUINTON avait réussi à imposer sa loi de constance thermique. II aurait pu en rester là, mais il sentait qu’il n’avait ouvert qu’une toute petite porte devant l’immense mystère des origines de la vie.

 

B) Serions-nous des aquariums marins ? La Loi de constance marine :

 

Si les espèces les plus récentes présentent exactement la température originelle de 44°, pourquoi le milieu intérieur de l’organisme ne serait-il pas également resté fidèle à la composition chimique du milieu cellulaire des origines ?

 

« La loi de constance thermique ne peut être une loi isolée. Elle ne peut être que la partie d’une loi de constance plus générale ».

 

QUINTON examine le représentant le plus récent et le plus élevé du règne animal, le vertébré supérieur : l’oiseau – dans quelles conditions vivent ses cellules ?

Elles baignent dans un plasma sanguin lymphatique qui, au point de vue minéral, est exactement le même que l’eau de mer. La concentration saline de ce plasma est de 8 grammes pour 1000. Sa température est de 44°.

Puisque la vie cellulaire a commencé probablement dans l’eau, à l’époque précambrienne où la planète était entièrement couverte par les océans, pourquoi le milieu intérieur du vertébré ne serait-il pas de l’eau de mer ?

 

« Lorsque mon esprit a fait ce rapprochement, a jeté ce pont au-dessus des millénaires, ajoutera QUINTON, j’ai été pris de vertiges ».

 

Cette identité du milieu intérieur à celle de l’eau de mer sera démontrée par QUINTON grâce à une série d’expériences remarquables qui lui permettront de formuler sa loi de constance marine :  

« La vie animale, apparue à l’état de cellules dans les mers, tend à maintenir, pour son haut fonctionnement cellulaire, à travers la série zoologique, les cellules constitutives des organismes dans le milieu marin des origines ».

Mais s’il y avait identité physiologique et chimique entre l’eau de mer et le milieu intérieur des animaux supérieurs ?

Il restait à expliquer leur différence de concentration en sel.

En effet, l’eau des mers actuelles renferme environ 33 g de sel par litre, tandis que le plasma des vertébrés n’en contient que 7 g.

Certains darwinistes, qui avaient formulé l’hypothèse d’une origine marine de la vie, avaient expliqué cet écart par le raisonnement suivant :

Eloignés du milieu marin primordial, les animaux vivant dans l’eau douce (complètement dessalée) ou sur la terre (pauvre en sodium) ont peu à peu cédé aux conditions nouvelles que leur a faite la vie :

Leur milieu intérieur s’est progressivement appauvri en chlorure de sodium.

QUINTON renverse audacieusement les termes de ce raisonnement :

Si le milieu vital du vertébré est en déséquilibre avec le milieu marin actuel,

ce n’est pas parce que l’animal s’est adapté,

ce n’est pas parce que son milieu vital s’est déconcentré,

c’est parce que :

LE MILIEU MARIN S’EST SURCONCENTRÉ AU COURS DES AGES

 

C) Loi de constance osmotique

 

« En face de la concentration progressive des océans, la vie animale, apparue à l’état de cellules dans des mers d’une concentration saline déterminée, a tendu à maintenir pour son haut fonctionnement cellulaire cette concentration des origines ».

Comme pour les températures, il fallait que la concentration saline des organismes des habitants des mers « date » leur ordre d’apparition comme pour les espèces terrestres.

L’expérience confirma les vues de QUINTON :

     Les plus anciens organismes marins qui n’ont pas su se protéger contre l’augmentation de la salure des océans et qui ont gardé pour milieu intérieur l’eau des mers actuelles, ont déchu et constituent la faune marine inférieure.

Après eux vinrent les vertébrés marins, c’est-à-dire les poissons, d’abord les poissons cartilagineux dont le plasma sanguin est concentré entre 15 et 23 g pour 1000 selon le moment où ils sont apparus, puis les poissons osseux – les derniers venus – dont le sérum est concentré seulement de 9 à 11 g pour 1000.

 

QUINTON démontra également que la loi établie à l’époque :

« une même anatomie commande une même physiologie »

était inexacte.

Alors qu’un invertébré marin comme le homard est perméable à l’eau de mer, son homologue d’eau douce, l’écrevisse, n’a passé des mers aux rivières qu’en acquérant un pouvoir nouveau : celui de se fermer au milieu extérieur, afin de conserver le milieu intérieur marin de son origine.

 

 L’écrevisse est absolument imperméable à l’eau douce où elle vit et ceci, sans changer de forme, uniquement par une transformation physiologique de certains appareils.

 

D) QUINTON précurseur de la théorie des oligo-éléments

 

Enfin QUINTON apporta les preuves chimiques de l’identité de l’eau de mer et du milieu interne, au cours d’une série d’analyses exposées dans son ouvrage « L’Eau de Mer, Milieu Organique » publié en 1904 chez l’éditeur Masson ‘ et dédié à MAREY.

Au moment de ses recherches, les ouvrages les plus récents n’admettaient que 12 à 15 corps simples dans le milieu intérieur.

C’est à QUINTON que revient le mérite d’avoir établi la présence, dans l’eau de mer comme dans le milieu intérieur, de 17 autres corps rares que l’on ne soupçonnait pas.

On lui objecta que ces corps ne s’y trouvaient qu’à l’état à peine pondérable et n’avaient aucune importance. QUINTON répondit que l’on n’était

 «nullement en droit de dire qu’un élément, si faible que soit sa proportion, ne joue qu’un rôle de second ordre dans une dissolution ».

II ajoutait :

« il y a toute une micro-chimie physiologique à peine commencée, qui montre le rôle capital que jouent certains corps dans la vie à des doses extrêmement réduites et à ces doses seules ».

II prédit en conséquence que les 92 corps simples devaient être contenus dans l’eau de mer à dose plus où moins infinitésimale et exister dans l’organisme dans les mêmes proportions.

 

 En cela, il est le précurseur de la théorie des oligo-éléments.

 

III) DE LA THÉORIE A LA PRATIQUE

 

a ) Une expérience décisive

Maintenant, il fallait expérimenter pour pouvoir démontrer que l’eau de mer ramenée à isotonie est rigoureusement identique au milieu intérieur : Ce sera la fameuse expérience des

« Chiens saignés à blanc »

 

C’est en 1897, dans le laboratoire de MAREY, au Collège de France, qu’il espère administrer la preuve de ce qu’il avance en présence de MAREY et d’autres chercheurs.

On peut imaginer son angoisse malgré la maîtrise qu’il affiche, et qui fit dire à MAREY :

« QUINTON possède le génie de l’expérience et il sait choisir l’expérience cruciale ! »

1/ - Pendant huit heures on injecte à un chien de 10 kg, par voie intraveineuse, une quantité d’eau de mer de 10,4 kg, soit 104% de son poids, sans inconvénient même mineur, l’élimination rénale étant parfaite.

2/ - Un chien est saigné à blanc par l’artère fémorale, il reste inerte, aux portes de la mort, le réflexe de la cornée de d’oeil ayant disparu. On lui injecte de l’eau de mer pendant onze minutes : le réflexe reparaît, le chien revient à la vie, se remet sur pied, le lendemain il trotte dans le laboratoire.

 

Ce chien, rebaptisé « Sodium » mourra 5 ans plus tard, écrasé par un autobus !

 

De mêmes expériences avaient été faites auparavant avec du sérum physiologique.

Les résultats étaient complètement différents. Le chien survécut péniblement quelques temps et mourut deux mois après (Docteur TUSSAUD).

 

b ) Expérience sur les globules blancs

La délicatesse du globule blanc est telle qu’on ne pouvait le faire vivre dans aucun milieu artificiel. QUINTON fait porter l’expérience sur presque toutes les espèces, poissons, batraciens, reptiles, mammifères, oiseaux.

Or, dans tous les cas, les globules blancs baignés dans le liquide marin continuent à présenter tous les signes d’une vie normale.

 

c ) La nécessité de ramener l’eau de mer à la concentration du plasma sanguin, origine du « Plasma de QUINTON »

La boucle était bouclée.

Il ne s’agit plus, pour QUINTON, que de passer de la théorie à la pratique en lançant le

« Plasma de QUINTON »

c’est-à-dire de l’eau de mer diluée avec une eau très pure jusqu’à isotonie et « stérilisée à froid » par des procédés spéciaux qui n’altèrent pas son caractère de milieu vivant, ni son équilibre moléculaire.

Tout procédé différent pour la fabrication se révèle inefficace sur le plan thérapeutique, sinon dangereux dans certaines utilisations.

Quant à l’énorme supériorité du « Plasma de QUINTON » par rapport au sérum physiologique, elle fut prouvée par QUINTON et le Docteur JULIA par toute une série d’expériences.

 

IV) LE PLASMA DE QUINTON ET SES APPLICATIONS THÉRAPEUTIQUES

 

De 1897 à 1904, René QUINTON :

applique son traitement marin,  

accumule des observations, 

commence à mettre minutieusement au point une « méthode » avec de jeunes médecins enthousiastes comme avec des professeurs et chefs de clinique éminents. 

QUINTON commence ses expérimentations dans des hôpitaux parisiens où on lui abandonne des cas désespérés :

un typhique en coma terminal qui devait mourir dans la journée,

un empoisonnement à l’acide oxalique,

une syphilitique,

un homme atteint d’une cirrhose du foie,

une jeune accouchée mourante après de terribles hémorragies.

Le plasma de QUINTON en injection opère à chaque fois le même miracle : les mourants, contre toute attente, sont sauvés.

Ses efforts se porteront surtout sur les enfants : atteints d’athrepsies, d’entérites cholériques, ils ressuscitent littéralement dès les premières piqûres d’eau de mer, on les voit prendre goulûment leurs biberons ou nourriture et prendre du poids à toute allure.

 

OUVERTURE DES DISPENSAIRES MARINS

Devant les succès éclatants remportés par les traitements de « Plasma de QUINTON », René QUINTON ouvre des dispensaires.

Dans le premier dispensaire QUINTON à Paris, ouvert en 1907, on compte 9 902 injections par mois (362 par jour).

Il en crée dans presque tous les quartiers de Paris, en province, à l’étranger (Angleterre, Belgique, Égypte, USA ... ).

L’une des soeurs du roi Édouard VII, la princesse Hélène, viendra elle-même à Paris pour se familiariser avec la « méthode ».

Bientôt, c’est une bousculade faisant la queue devant les dispensaires.

Un médecin, le docteur Jean JARRICOT, écrira en 1933, évoquant ces débuts de la cure marine :

« Rien n’effacera en nous l’inoubliable vision : les mères découvrant sur leurs genoux, désespérées, leurs enfants mourants et QUINTON, secret, silencieux, mais les lèvres frémissantes, et versant sur elles toute la pitié, toute l’éblouissante intelligence, toute l’impérieuse certitude dont peut être chargé un regard humain. »

Les résultats sont si miraculeux que la presse française et presque aussitôt celle du monde entier, s’emparent de l’événement.

La méthode marine apparaît comme une immense révolution dans le domaine médical, et René QUINTON comme un bienfaiteur de l’humanité.

 

LES RÉSULTATS LES PLUS SPECTACULAIRES DE LA CURE MARINE : 50 années d’observations et de traitements dans des dispensaires et des hôpitaux.

 

Gastro-entérites, choléra infantile, athrepsies

La thérapeutique de QUINTON est surtout connue pour les maladies des enfants :

intolérance au lait,

gastro-entérites du nourrisson,

choléra infantile,

athrepsies,

retard de développement.

 

Malgré l’apparition des antibiotiques, le plasma de QUINTON restait dans les cas cliniques graves le meilleur traitement contre ces maladies.

 

Jusqu’à la fermeture des laboratoires QUINTON au début des années 80, il y a eu encore des « miraculés du plasma de QUINTON » comme il y en avait au début du siècle, évidemment en moindre nombre.

 

Avec le plasma de QUINTON, dès la première injection, les bébés acceptent le lait et toute nourriture. Alors qu’avec un traitement classique en hôpital, l’enfant met beaucoup plus de temps à se remettre.

Un article du Herald Tribune de novembre 1988 rappelait que 4,5 millions d’enfants du Tiers-Monde meurent chaque année de gastro-entérites, ainsi que 504 enfants américains par an ! Aux U.S.A., 200 000 enfants de moins de cinq ans étaient hospitalisés par an et 5 539 petits américains étaient morts de gastro-entérites entre 1973 et 1983.

 

Le Régime de l’instinct mis au point par QUINTON :

Le régime de l’instinct est celui dans lequel les quantités de lait et d’eau absorbées chaque jour par l’enfant sont fixées par l’enfant lui-même, sous la réserve expresse qu’il soit offert à l’enfant, dans les 24 heures, un nombre de biberons suffisant pour qu’à aucun repas ses besoins alimentaires ne se trouvent limité; par la capacité de son estomac.

Le régime de l’instinct est donc le régime quantitatif en lait et en eau fixé par l’enfant lui-même, selon les besoins réels qu’il éprouve, en dehors de toute ingérence humaine tendant à le limiter ou le forcer.

 

Ce régime ne se conçoit pas en dehors de l’emploi des injections de « Plasma de QUINTON », dont il est le complément indispensable sous réserve de quelques situations identifiées dans la méthode. La méthode comprend également des règles concernant la fonction de thermolyse, particulièrement étudiée par le docteur Jean JARRICOT.

Enfin, la surveillance de la croissance et le contrôle de l’action marine ont été fixés après des années de recherche en des tables d’une extrême précision qui permettent, non seulement de fixer le retard pondéral du nourrisson, mais en même temps de fixer son régime et de suivre son accroissement.

 

Reconstitution de la masse sanguine

L’eau de mer a été employée avec succès chez certains grands blessés ou opérés pour remplacer la masse sanguine, et sans problème de compatibilité avec les groupes sanguins. Ces expériences ne font pas stricto sensu partie de la méthode marine, mais elles ont corroboré les expériences initiales de QUINTON.

 

Traitement prénatal

C’est dans le traitement des femmes aux grossesses difficiles que se trouve une des applications les plus spectaculaires du « Plasma de QUINTON » :

la fatigue et les vomissements incoercibles de la grossesse disparaissent, même pour les formes aiguës de vomissements et les troubles gastro-intestinaux.

Des femmes ayant eu des fausses couches à répétition ou des prématurés, des mort-nés, ou des enfants atteints de maladies héréditaires (tuberculose, syphilis), ces mêmes femmes, traitées au « Plasma de QUINTON », pendant une nouvelle grossesse, accouchent d’enfants normaux et en parfaite santé.

Le docteur Jean JARRICOT, qui dirigea le dispensaire marin de Lyon pendant 30 ans, écrit dans son livre « Le dispensaire Marin », l’impressionnant bilan de nombreuses années de traitements :

« L’eau de mer agit si puissamment sur la tare originelle que les stigmates anatomiques, caractéristiques des héréditaires, tendent à s’effacer chez les sujets ayant été soumis au traitement main prénatal ».

Le « Plasma de QUINTON » a donné d’excellents résultats dans d’autres domaines tels que l’asthénie et d’autres affections nerveuses, ou des atteintes dermiques comme le psoriasis ou l’eczéma.

Il ne faut pas pour autant considérer le « Plasma de QUINTON » comme une panacée, mais comme un traitement de « fond » qui permet à l’organisme de s’opposer à un élément perturbateur, de donner à la matière vivante la force de vaincre.

 

 

V) ACTUALITÉ DES TRAVAUX DE QUINTON

 

De son vivant, et après sa mort, René QUINTON a eu de fervents admirateurs et des détracteurs.

Ces derniers, d’ailleurs, n’ont jamais pris la peine d’étudier la méthode marine ; ils ont nié en bloc son efficacité sans même prendre en compte les résultats obtenus par la guérison des malades.

II est vrai que QUINTON, comme Pasteur, n’était pas médecin et cela a été un prétexte de « méfiance » mis en avant par une partie du corps médical.

 

VI) RENE QUINTON ET L’AÉRONAUTIQUE 

 

Durant les dernières années de la vie du Professeur MAREY, QUINTON suit ses travaux sur le mouvement des êtres vivants, analysée par chronophotographie sur film (il est un précurseur dans l’invention du cinéma, avant les frères LUMIÉRE).

II décompose ainsi le vol complexe des oiseaux ; il analyse ces mouvements avec les premiers pionniers de l’aviation : pour QUINTON, c’est le déclic pour une nouvelle passion grâce à l’amitié qui naît immédiatement entre lui et les Capitaines RÉNARD et FERBER, ainsi qu’avec Paul PAINLEVE au sein de l’institut MAREY.

PAINLEVE est un normalien sciences brillant, qui va être élu à l’Académie des Sciences en 1904.

C’est aussi un homme politique déjà connu, et il va soutenir QUINTON pendant 20 ans, tous deux persuadés de l’avenir de ce moyen de locomotion révolutionnaire ; PAINLEVE l’évoque déjà dans son cours de mécanique à Polytechnique. Dès 1903, ils ont suivi les premiers vols planés de FERBER et de VOISIN, dans les vents ascendants des falaises de Berck.

Plus tard, QUINTON sera fasciné par les longs vols planés des oiseaux dans les ascendances thermiques du désert égyptien (au cours de son séjour où le Plasma Marin va sauver des milliers de bébés lors d’une épidémie de choléra infantile).

D’où leur idée commune de développer le vol à voile en France... qui n’aboutira qu’en 1922 !

Dès 1903, on apprend avec incrédulité le premier vol contrôlé d’un avion par les frères WRIGHT aux USA. Puis ce sont les premiers sauts de puce de leur ami SANTOS-DUMONT à Bagatelle (1906).

Mais c’est 1908 l’année cruciale, où le premier kilomètre est franchi à Issy par FARMAN, en janvier ; puis c’est l’arrivée de Wilbur WRIGHT en août, qui vient chercher la gloire et la fortune en France : il bat tous les records au camp d’Auvours, prés du Mans.

QUINTON pense que l’aviation a cessé d’être un sport pour devenir un moyen de transport sans limites. Il est donc temps d’aider financièrement ces intrépides aviateurs par des prix importants leur permettant de faire progresser la technique dans les ateliers modernes, qui vont alors se multiplier.

En septembre 1908, QUINTON crée et préside la « Ligue Nationale Aérienne » qui réunit, non seulement Paul PAINLEVE, mais aussi deux grands mécènes : DEUTSCH de LA MEURTHE et ARCHDEACON, comme Vice-présidents, et des personnalités scientifiques, politiques et militaires éminentes. Leur première idée est de créer un comité technique avec la plupart des futurs conquérants du ciel (FERBER, BLERIOT, FARMAN, les frères VOISIN...).

La Ligue crée de nombreux prix, mais aussi la première école de pilotage du monde à Juvisy, dirigée par FERBER.

C’est un succès éclatant et QUINTON - comme d’habitude - suscite l’enthousiasme lors de ses premières conférences, prévoyant l’avenir avec une justesse incroyable.

En octobre 1908, QUINTON a assisté, au camp d’Auvours, au vol de PAINLEVE comme passager de Wilbur WRIGHT, où ils battent les records de distance (70 km) et de durée de vol (1 h 09 min) ; et c’était avec un académicien !

QUINTON en tire une merveilleuse conclusion :

en calculant le prix du pétrole consommé pour deux « passagers » et la distance parcourue, il déduit que l’avion est moitié moins cher que les trains rapides ! (5 centimes au passager/km).

Il prédit aussi qu’on pourra bientôt voler jusqu’aux Indes ! (mouvements divers dans la salle de l’Université des Annales !).

Il s’inquiète de la sécurité insuffisante de l’avion, mais voit déjà ses applications comme ambulance volante.

En fait, la guerre approche, QUINTON forme un Comité militaire chargé de convaincre le Gouvernement de lancer d’urgence des avions spécifiquement militaires ; ainsi seront crées les premières escadrilles, engagées dès le début de la guerre pour la reconnaissance aérienne, puis le bombardement et le combat.

Après l’Armistice, QUINTON, alors Vice-président de la « Ligue Aéronautique de France », rêve à nouveau du vol à voile. Son ami PAINLEVE va encore le soutenir, et lui rendra ainsi hommage devant sa tombe, en juillet 1925.

« L’aviation eut dès sa naissance, en René QUINTON un prophète enthousiaste. La Ligue Aérienne créée par lui fut un merveilleux instrument de persuasion et de propagande. Mais nous devrons revendiquer, pour lui, un autre titre que l’on oublie trop.

QUINTON fut le premier à prévoir qu’un être humain pourrait se maintenir indéfiniment sans moteur : bref, il fut le premier à annoncer le vol à voile.

Dès le début de l’aviation (juin 1908), il fondait un prix destiné au pilote qui demeurerait 5 minutes en l’air, sans perdre de la hauteur, moteur éteint. Les railleries ne furent pas épargnées à ce donateur platonique qui créait un prix impossible à gagner avec des conditions chimériques.

Et quand en 1922 des rivaux étrangers réalisèrent, sans moteur, d’impressionnantes performances, ce fut René QUINTON qui sonna le réveil de l’aviation française et déclencha l’effort par lequel elle rattrapa bien vite, et au-delà, le temps perdu. Rendons, sur ce point, hommage au précurseur ».

 

Cette action porte ses fruits :

MANEYROL, en octobre 1922, bat le record de durée du vol à voile (plus de 3 h !).

QUINTON organise alors les meetings de Grasse, puis de Brika, dans les ascendants des montagnes algériennes, où le lieutenant THORET vole pendant 7 h sur un avion hélice calée : il avait enfin gagné le prix QUINTON de 1908.

 

VII) RENE QUINTON SOLDAT

 

QUINTON était très patriote et bien que dégagé de toute obligation militaire, il s’engagea dès le début de la guerre, en août 1914, dans l’artillerie.

Toute son énergie se transforme en un héroïsme naturel : fin 1914, dans une citation à l’ordre de l’armée, FOCH écrira :

« Officier de la plus rare intrépidité dont il est impossible d’énumérer les actes de bravoure... S’est affirmé comme un excellent commandant de groupe, ayant la plus grande autorité et sachant obtenir de son personnel le rendement maximum ».

 

VIII) LES DERNIERS TRAVAUX DE QUINTON ET SON SOUVENIR

 

Le lendemain de la démobilisation, QUINTON est à son dispensaire, et reprend immédiatement ses travaux d’anthropologie : il avait remarqué que, contrairement –une fois de plus 1- à ce qu’on enseignait, l’indice céphalique n’est pas fixé de la naissance à la mort, et que l’enfant naît, quand à l’indice céphalique, indépendant de ses parents et de sa race. Il pense ainsi déterminer le lieu où apparut la race humaine.

Ses importants travaux sur le sujet sont encore inédits, ainsi que ceux concernant l’apparition de la vie aux pôles.

QUINTON, débordant d’activités partagées entre sa thérapeutique marine et sa passion de l’aviation, va être soudain foudroyé par une crise d’angine de poitrine, le 9 juillet 1925.

Beaucoup d’amis le pleurent et voudraient perpétuer sa mémoire ; le Maréchal FRANCHET d’ESPEREY préside un comité pour lui élever un monument à Chaumes en Brie où il était né 59 ans plus tôt.

A son inauguration, en octobre 1931, FRANCHET d’ESPEREY rappelle ses faits d’armes ; PAINLEVE retrace son parcours scientifique, couronné par le succès de son plasma marin, ainsi que leur amitié profonde née de la création de la Ligue Nationale Aérienne et leur passion commune de l’aviation.

IX) Que reste t’iI aujourd’hui de René QUINTON ?

Comme la plupart des savants célèbres en leur temps, l’oubli gagne peu à peu... Cependant, il restera toujours des traces profondes de René QUINTON précurseur, grâce aux travaux des chercheurs qui pensent que notre patrimoine marin restera toujours une source de vie.

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